Lever les freins à la mise en place de démarches participatives dans des programmes d'éducation pour la santé - Interview du CODES 93
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La dynamique de nos programmes d’éducation pour la santé associe au mieux les publics, parce qu’il ne s’agit pas de programmes qu’on pourrait qualifier « d’informationnels » mais de programmes fondés sur des objectifs d’apprentissage qui seront d’autant mieux atteints s’ils s’appuient sur des techniques participatives.
Depuis plus de 40 ans, le Comité départemental d'éducation pour la santé en Seine-Saint-Denis (CODES 93) intervient en Seine-Saint-Denis afin de développer l'éducation pour la santé auprès des populations en proposant des actions auprès des publics, des formations et un accompagnement des acteurs de la promotion de la santé dans le département et en région Ile-de-France.
Malgré les contraintes et les freins à la mise en place de démarches participatives dans des programmes d’éducation pour la santé, comment permettez-vous la participation du public aux projets que vous développez ?
Les programmes d’éducation pour la santé ne peuvent pas ne pas laisser une place à l’expression des populations concernées.
Tout d’abord, tous nos programmes s’appuient sur des démarches de formation active : outils et techniques d’expression tels que les photolangages, métaplan, techniques de Delphes…
D’autre part, une phase de recueil des attentes et des besoins est proposée, toujours trop courte malheureusement, mais elle occupera une place importante au moment de la prise de contact avec le public, par exemple au cours du premier atelier d’un programme.
Cette phase de recueil des attentes et des besoins permettra ensuite de décliner plus précisément le contenu des ateliers suivants. Chaque atelier sera par ailleurs évalué, à l’oral et à l’écrit, pour permettre une meilleure adaptation.
La dynamique de nos programmes d’éducation pour la santé associe au mieux les publics, parce qu’il ne s’agit pas de programmes qu’on pourrait qualifier « d’informationnels » mais de programmes fondés sur des objectifs d’apprentissage qui seront d’autant mieux atteint s’ils s’appuient sur des techniques participatives.
L'éducation pour la santé a pour ambition d'augmenter le pouvoir d'agir des personnes. A partir d'un ou deux exemples, pouvez-vous illustrer comment vos interventions facilitent l'empowerment individuel des personnes ?
Nos publics sont en très grande majorité en situation de grande précarité, à faibles revenus et faible niveau scolaire. Ils sont à la fois dans l’attente et la crainte d’une prise de parole.
L’objectif de nos programmes d’action ou de formation est de renforcer la capacité d’agir de ces personnes. Tous nos programmes visent à renforcer les compétences psychosociales (CPS) des individus et s’appuient pour cela sur des techniques et des outils spécifiques aux développement de ces CPS. Notamment, le renforcement de l’empowerment va passer par la participation active des publics aux actions. Il s’agira de laisser la place à leur réflexion et à leur parole, sans jugement, et avec bienveillance, pendant les ateliers.
Nos actions passent par la construction d’un cadre, par exemple en co-construisant des règles de fonctionnement des ateliers, qui permettra l’expression des idées de chacun, sans crainte d’un rejet par les autres. Cette prise de parole participe au renforcement de l’empowerment des publics, qui souvent par crainte d’un jugement négatif de leurs idées, n’osent pas prendre la parole et s’auto-censurent.
C’est aussi par l’utilisation d’outils simples et de techniques qui permettent de donner la parole et favorisent l’expression des publics. Il s’agit par exemple du métaplan ou de l’Abaque de Régnier.
Au moment de vos interventions ou à leur issue, constatez-vous parfois des dynamiques d'empowerment collectif ? Si oui, de quels types ?
Les techniques et outils utilisés pendant nos programmes s’appuient en partie sur des dynamiques collectives. Les échanges et la réflexion collective sont favorisés, ainsi que la recherche de solutions en commun.
Ces méthodes permettent des moments où percent un empowerment collectif. Il faut souligner deux choses importantes :
- La culture française globalement est étrangère à la notion d’empowerment : la pédagogie à l’école notamment ne met pas en avant la participation et la co-construction.
- Nos publics sont des populations vulnérables, en grande précarité, justement éloignés de tout empowerment, le moins susceptible de se mobiliser sur un temps long, nécessaire à tout travail de renforcement des CPS
Dès lors, nos programmes ne peuvent prétendre qu’à initier un renforcement de l’empowerment des populations et aussi des professionnels.
Cependant, ces limites étant posées, nous observons l’émergence de projets et de programmes dont l’écriture collective aura commencé pendant une action de formation. Nos actions de formation visent à développer les capacités des professionnels à co-construire des programmes, et elles sont fréquemment l’occasion d’un début de construction collective entre professionnels d’un même territoire.
Par ailleurs, nos actions auprès des populations permettent des dynamiques collectives : il s’agira par exemple d’un groupe d’aidants qui se retrouvera et organisera une activité telle qu’une sortie en dehors du programme d’ateliers, ou des personnes âgées qui auront suivi un programme d’éducation santé et qui porteront la mise en place d’une activité « cueillette ».
- Fiche 1a - Une expérience d’utilisation du « Métaplan®» pour aborder le concept de santé IREPS Bretagne (Page 5)
- La méthode de Delphes* CRES Réunion
- Fiche 2a - Une expérience d’utilisation du « Photolangage®» pour aborder le concept de santé IREPS Bretagne (Page 9)
- L’Abaque de Régnier* CRES Réunion