La participation, drôle(s) de cuisine(s)!

Ce film (suivi de la retranscription intégrale du texte) a été réalisé par Elsa Thomas, sur une idée de Pas de Côté en Santé. Il est extrait d'une séquence du e-parcours sur la Promotion de la santé, module d'e-learning construit par Promotion Santé Ile-de-France en 2022, en partenariat avec Pas de Côté en Santé.

En savoir plus sur le e-parcours 

 

Introduction

Et si on parlait de la participation dans vos projets ?
Dans la charte d’Ottawa, texte de référence en promotion de la santé, le renforcement de l’action communautaire est une des cinq stratégies qui apparaît souvent comme une condition de financement dans les appels à projet. Agir au niveau communautaire implique la mobilisation des acteurs d’un territoire et leur participation.

Mais concrètement, que signifie « la participation » ? Quels en sont les rouages et qui en sont les acteurs ? C’est ce que nous vous invitons à découvrir dans ce jardin partagé.

Participation(s)

Avant de commencer la visite, il est important de préciser qu’il n’existe pas une forme unique de participation. La participation n’est pas une pensée magique, elle ne se décrète pas mais se construit. Elle n’est pas une recette miracle qui pourrait s’appliquer de manière uniforme à tous les projets.

Elle varie selon :

  • les méthodes
  • les acteurs
  • le contexte
  • mais aussi les objectifs visés.

Alors mettons de côté notre livre de recette, et reprenons depuis le début.

Besoin de changement

A l’origine de la démarche participative se trouve une question, un problème à résoudre, ou un besoin de changement.

En réalisant un diagnostic, il s’agit de partager la nature de cette question, de faire le point sur les ressources existantes, et les facteurs qui impactent notre santé, notre bien-être et notre qualité de vie. Et d’affirmer une volonté d’y répondre collectivement. Mais on se sent parfois impuissants face à un besoin ou une envie de changement…

La place de la promotion de la santé

C’est là que rentre en scène la promotion de la santé. La promotion de la santé soutient que le changement n’est jamais l’affaire d’une seule personne. D’ailleurs, il ne s’agit pas de changer « les gens » mais bien de faire évoluer les environnements, les pratiques, les organisations. Le changement est donc plutôt à concevoir comme un processus qui concerne autant l’individu, la communauté et le politique. Où chaque acteur agit en faveur de sa santé et celle des autres.

Mais quand on parle d’acteurs, de qui parle-t-on ?

Les acteurs

La participation est une matière vivante qui regroupe :

  • les habitants
  • les professionnels (qui peuvent être des enseignants, professionnels de santé, travailleurs sociaux, etc…)
  • les décideurs

Définir la participation uniquement comme la parole aux seuls habitants dans un projet, peut être contre-productif. Les professionnels et les élus pourraient voir dans leur analyse, une évaluation ou une remise en cause de leurs pratiques et résister à la prise en compte de leur point de vue. Cependant, les frontières sont poreuses. Pour avancer ensemble, il est important que quelqu’un anime, favorise les liens…

Mais alors parmi ces acteurs, qui initie ces démarches participatives ? Qui est instigateur du changement ?

Entrer dans la participation par une commande institutionnelle

Les démarches participatives peuvent tout d’abord relever d’une commande institutionnelle pour lancer ou déployer une politique publique.

Par exemple : l’agriculteur voyant que le jardin partagé où il anime des ateliers n’est pas très fréquenté, envoie des ambassadeurs parmi les citoyens pour en parler à d’autres usagers.
L’objectif est de s’appuyer sur les personnes concernées pour devenir le relais de ces politiques auprès de la communauté. On parle alors de vision utilitariste.

Cette commande peut aussi porter sur la consultation des usagers dans le cadre de l’analyse de leurs besoins et du partage de leurs expériences pour éclairer les choix des professionnels et des décideurs. On parle d’une vision démocratique.

Mais parfois cela va plus loin, et les usagers peuvent aussi participer à la décision, et à la mise en œuvre des actions. On parle alors de co-construction, de co-décision et de co-gestion.

Entrer dans la participation par la mobilisation des usagers

Autre cas de figure, les habitants peuvent se mobiliser pour résoudre les problèmes auxquels ils sont confrontés. On parle alors d’autogestion.

Les citoyens regroupés en collectif ou association peuvent ensuite se tourner vers les élus et des professionnels pour influer sur leurs décisions et actions.

Participation n'égale pas action collective.

ATTENTION : Cependant, la participation ne se résume pas au nombre de personnes présentes. Elle ne se confond pas avec l’action collective et ne se définit pas par la simple présence des personnes concernées, mais bien par la place, le rôle que chacun va prendre dans le projet.

Pour se lancer dans une démarche participative, il faut d’abord définir un cadre sécurisant, respectueux et favorable à l’expression de tous. Ce cadre se construit petit à petit et collectivement. Il définit les modalités de participation, les finalités du processus de participation, la place des personnes concernées, le niveau de décision, d’autonomie et de confidentialité des échanges, etc… Tous ces critères qui vont plus ou moins favoriser le pouvoir d’agir et l’empowerment des usagers.
Poser ce cadre collectivement permet d’éviter les malentendus. Mais il n’est pas gravé dans le marbre ! Il peut évoluer et il est important d’y revenir régulièrement.

Les compétences de chacun font la force du groupe

S’engager dans une dynamique de changement demande un minimum de compétences. La confiance en soi, la capacité à écouter l’autre, à exprimer ses besoins, ou à solliciter de l’aide…

Chez les professionnels comme chez les élus ou les habitants, certains peuvent avoir l’habitude des projets participatifs mais pour d'autres, cela peut-être plus compliqué. Ce n’est pas parce qu’on est un professionnel que l’on sait partager ses connaissances, les rendre accessibles, ou que l’on ose prendre la parole pour les partager.

Pareil chez les usagers : ce n’est pas parce que l’on s’intéresse au sujet, qu’on en maîtrise les enjeux et qu’on a la capacité de prendre position…

D’un côté comme de l'autre, chacun veut faire valoir ses droits, ses envies et ses compétences personnelles. Cela nécessite donc une reconnaissance de la légitimité de chacun même en cas de désaccord pour trouver un équilibre.

Comment on fait ?

Plongeons maintenant dans la marmite... Nous voici au cœur de la démarche participative. Mais regardons de plus près car elle ne se résume pas à mettre tout le monde dans la même pièce et à engager le débat.

Cette dynamique se nourrit de quelques ingrédients incontournables :

  1. des stratégies pour chercher & mobiliser des acteurs
  2. des participants enthousiastes
  3. des méthodes et des outils favorables aux échanges et à la créativité
  4. de la confiance et une communication adaptée à l’espace de discussion
  5. un lien avec le terrain (diagnostic local)
  6. une entente autour des « ignorances communes »
  7. accepter de prendre des temps de réflexions et concertation séparés entre pairs
  8. accepter la « non-participation » ou la mise en retrait de participants
  9. accepter les désaccords et parfois l’absence de consensus

En bref, la participation doit rester une démarche ouverte et accueillante, où chacun à la liberté d'aller et venir, de donner et recevoir.

La créativité

Nous avons parlé jusqu’ici du cadre, mais il peut parfois être bénéfique de s’en éloigner. Trop de planification rigoureuse peut nuire à la participation ou la rendre ennuyeuse.

Suivez le mouvement du groupe. Autorisez-vous l’improvisation, le jeu, la créativité. Quand cela est possible pensez à être au moins 2 pour construire et animer ces temps. Cela permet de se soutenir, d’observer, et de s’adapter.

Prendre le temps

Si vous trouvez que le temps passe trop vite et que l’action ne s’est pas mise en place... Pas de panique !

A travers les échanges, les positions bougent, les compétences des uns et des autres s’unissent et se renforcent. On est bien dans l’action puisque des changements s’amorcent !
Cela prend un peu de temps mais ce n’est surtout pas du temps perdu !

Évaluer

Enfin, comment mesurer l’efficacité d’une démarche participative ?

L'écueil serait de mesurer son efficacité seulement à travers des indicateurs sur l’état de santé ou épidémiologiques. En d'autres termes, dans notre jardin partagé, il ne s’agit pas de compter combien de potirons et de carottes ont été ramassées et si le taux de diabète des habitants autour du jardin à baissé. Mais plutôt de s’interroger sur les changements de l’environnement et de chacun des acteurs, tout au long de la démarche participative.

Évaluer c’est regarder régulièrement son jardin et s’interroger :

  • Est-ce que chacun a trouvé sa place ?
  • Les participants ont-ils changé de point de vue ou de manière de faire ?
  • Les organisations se sont-elles modifiées sous l’influence des échanges ?
  • Quels ont été les leviers et les freins ?

La convivialité

Enfin, il ne faut pas oublier que la participation c’est aussi du plaisir. La convivialité est un levier de la participation. Ce n’est pas anecdotique.

Prendre le temps c’est aussi s’accorder des temps de répit et d’échanges informels avant, après et même pendant les rencontres. Partager un repas par exemple, l’offrir aux personnes présentes participe de la reconnaissance de leur place et de leur contribution. Cela crée de la cohésion, des échanges informels et en plus c’est la moindre des choses, non ?

Conclusion

Il y a plein de manières d’accommoder les légumes du jardin. Lancez-vous, testez, expérimentez de nouvelles recettes. Les légumes vont changer en fonction des saisons, la récolte n’est pas toujours abondante, vous serez tributaires de la météo. Faites confiance à vos talents de cuisinier, à votre instinct et à votre palais !

On vous souhaite une belle participation !

 

Pas de Côté en Santé vous accompagne dans vos projets en promotion de la santé afin d’expérimenter des démarches innovantes favorisant les démarches participatives en santé, c’est-à-dire l’inclusion et l’implication des tous les acteurs susceptibles d’être concernés par le projet : professionnels, élus, habitants, usagers, partenaires, etc.

Découvrez le site internet de Pas de côté en santé pour en savoir plus sur ses missions : conseil, formation, accompagnement et évaluation en promotion de la santé ; production de connaissances en promotion de la santé et démarches participatives (capitalisation et recherche interventionnelle) ; partage de connaissances.

E-parcours en promotion de la santé