A noter que la politique de la ville promeut également les approches facilitant la participation des habitants à l’ensemble de ces projets. Elle a joué un rôle précurseur en matière de participation des habitants, notamment dans le champ de la santé au travers des approches en santé communautaire.
La Mission ville de la préfecture de région appuie le préfet secrétaire général aux politiques publique dans le pilotage régional de la politique de la ville et la programmation des actions qui la composent.
L’articulation entre politique de la ville et les politiques de santé
La politique de la ville, coordonnée à l'échelle nationale par l'ANCT (Agence Nationale de la Cohésion des Territoires), a pour objectif la réduction des inégalités entre les territoires en mobilisant des crédits spécifiques au bénéfice des habitants des quartiers les plus fragiles, les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), en complément des crédits du droit commun.
En Ile-de-France, on recense 272 QPV. En matière de santé, les quartiers prioritaires de la politique de la ville sont marqués par une offre de soins déficitaire. La part des personnes sous le seuil de pauvreté et de bénéficiaires de la CMU-C y est trois fois supérieure aux autres territoires (Rapport de l’Observatoire national de la politique de la ville, 2018). Les habitants des quartiers prioritaires rencontrent fréquemment des problématiques de santé liées à la précarité. La politique de la ville vise ainsi à restaurer l’égalité dans les quartiers les plus pauvres et à améliorer les conditions de vie de leurs habitants, notamment en favorisant l’accès aux services et aux soins. Cette action s’inscrit dans un cadre à la fois interministériel – en lien avec la stratégie nationale de santé et « Ma santé 2022 » pilotés par le ministère des Solidarités et de la Santé – et partenarial au travers des démarches territoriales de santé et des contractualisations locales. L’ANCT, dans son dialogue avec le Ministère des solidarités et de la santé, soutient l’accompagnement des habitants des QPV à travers la médiation en santé, en particulier au sein des centres et maisons de santé implantées dans les quartiers. La médiation en santé désigne la fonction d’interface assurée entre les personnes vulnérables éloignées du système de santé et les professionnels intervenant dans leur parcours de santé, dans le but de faciliter l’accès de ces personnes à leurs droits, à la prévention et aux soins. Ces fonctions de médiation peuvent être assurées par des adultes-relais, dispositif financé par l’Etat qui permet à des demandeurs d’emploi issus des quartiers politique de la ville d'assurer des missions de médiation sociale, sanitaire ou et culturelle de proximité dans le cadre d'un contrat d'insertion. [Fiche de présentation du dispositif Adultes-relais]
Les démarches territoriales de santé et les contractualisations locales
Il existe un lien fort entre la politique de la ville et les politiques de santé. Historiquement, les ateliers santé ville (ASV), démarches locales et dispositifs publics mis en place par le Comité interministériel de la Ville de 1999 dont l'objectif est de contribuer à la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé, puis les contrats locaux de santé (CLS) et les conseils locaux de santé mentale (CLSM), se sont développés dans les territoires afin de réduire les inégalités sociales et territoriales et d’optimiser l’accès aux soins pour tous. Les CLS et CLSM ont ainsi été construits dans une logique de prise en compte des territoires de la politique de la ville : les territoires urbains les plus pauvres ciblés par la politique de la ville sont les territoires aux plus forts besoins de santé et en général aux plus faibles ressources en système de soins.
Dans les territoires de la politique de la ville, le maillage partenarial s’articule donc autour des contrats locaux de santé (CLS) et des contrats de ville, le volet santé des contrats de ville étant une opportunité pour les acteurs des territoires de renforcer les actions dédiées à l’amélioration de l’accès aux soins et à la prévention en santé des habitants des QPV. Les projets portés par les centres et maisons de santé peuvent être financés dans le cadre des contrats de ville, notamment lorsque leur patientèle est principalement composée d’habitants des QPV, lorsque leurs démarches qualitatives s’orientent vers les habitants des QPV, lorsque leur projet de santé s’articule avec les démarches territoriales de santé du territoire (ASV, CLS, CLSM) ou dès lors qu’une articulation avec les conseils citoyens, les associations et les structures non-sanitaires implantées dans les QPV (centres sociaux, médiateurs sociaux, mission locale, structures médico-sociales, etc.) est prévue dans le projet de la structure.
A noter que la politique de la ville promeut également les approches facilitant la participation des habitants à l’ensemble de ces projets. Elle a joué un rôle précurseur en matière de participation des habitants, notamment dans le champ de la santé au travers des approches en santé communautaire [1] . La mise en place de conseils citoyens depuis 2014 a ainsi permis à un collège d’habitants de relayer et faire entendre l’avis des habitants, notamment en matière de santé, dans le cadre des instances décisionnelles des contrats de ville. [Synthèse des rencontres Nationales de la Santé en Quartiers Populaires de Chambéry, 2017]
Les mesures nationales de la politique de la ville en matière de santé
A l’échelle nationale, dans le cadre de la Mobilisation nationale pour les habitants des quartiers, lancée par le Président de la République en 2018, une quarantaine d’actions ont été initiées « afin de garantir les mêmes droits aux habitants des quartiers qu’à ceux des autres territoires ». Le doublement du nombre de maisons et centres de santé, dans et à proximité des QPV, est prévu d’ici 2022 (en mars 2019, il y avait 59 maisons de santé pluridisciplinaires et 221 centres de santé sont en activité dans les QPV).
Lors du Comité interministériel des villes du 29 janvier 2021, le gouvernement a annoncé plusieurs mesures :
- Ouvrir 60 centres et maisons de santé pluri-professionnels et participatifs dans les quartiers : Ces structures offriront une prise en charge globale (médico-psycho-sociale) adaptée aux besoins particuliers des habitants des QPV, en recourant à des services de médiation sanitaire et d’interprétariat. Leur projet de santé sera construit avec les habitants afin de les rendre acteurs de leur santé. Pour soutenir l’émergence et la consolidation de ces structures participatives, un appui aux actions concrètes de proximité (ex : médiation en santé, interprétariat professionnel, diagnostics et études préalables à la mise en place d’un centre ou d’une maison de santé ou d’un lieu d’écoute en leur sein, actions favorisant l’accueil et l’intégration des professionnels de santé sur le territoire, sensibilisations sur la participation en santé…) notamment impulsées par ces structures existantes ou en cours de développement dans et à proximité des QPV sera favorisé par l’Etat, hors prise en charge par les crédits de droit commun prévus au titre de Ségur de la santé.
- Renforcer et moderniser les dispositifs de lutte contre les addictions dans les quartiers : Dans le cadre du Ségur de la Santé, l’Etat renforce les dispositifs de l’addictologie afin de mieux repérer, orienter et prendre en charge les personnes confrontées à des addictions. Dans les centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) et les centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues (CAARUD), les équipements seront modernisés pour permettre le recours aux téléconsultations/ télé-soins, et les effectifs renforcés pour assurer « l’aller-vers ».
- Former les acteurs de terrain dans les quartiers au programme de premiers secours en santé mentale (PSSM) : L’ensemble des acteurs de la politique de la ville peuvent élaborer une stratégie de formation aux PSSM et de déploiement en directions des publics identifiés comme prioritaires dans chacun des QPV (NEET[2] , publics scolaire ou collégiens, addictions…). Les personnes mobilisées pour ces formations peuvent être des membres de la communauté volontaires, membres d’associations ou des professionnels (enseignants, travailleurs sociaux, éducatifs, éducateurs, médiateurs sociaux, missions locales …).
- Développer le réseau de maisons sport-santé : De nouvelles maisons sport-santé seront créées dans les quartiers prioritaires d’ici 2022. Outre la féminisation et la pratique en famille des activités sportives, elles offriront un accompagnement personnalisé à des publics éloignés ou réticents à une pratique sportive (sur les 138 maisons sport-santé labellisées en 2020, 99 sont situées dans une commune composant au moins un quartier et 6 directement dans un quartier). L’articulation entre ces structures et les centres et maisons de santé pluri-professionnels et participatives seront favorisés au travers d’un soutien aux actions d’ « aller vers » ciblées en direction des habitants éloignés de l’activité physique et sportive.
L’instruction du 10 mars 2021 de la direction générale des collectivités locales relative aux moyens d'intervention de la politique de la ville rappelle que l’accès aux soins pour les habitants des QPV constitue une problématique de longue date que la crise sanitaire a mise en exergue. Elle ajoute que l’accès aux soins doit être pensé de façon structurée et globale dans le cadre de coopérations renforcées entre acteurs (préfectures, agences régionales de santé, collectivités territoriales, associations œuvrant dans le champ de la santé et habitants…) afin d’améliorer l’efficience des stratégies d’actions en santé dans les QPV. Elle réaffirme la nécessité de structurer les démarches territoriales de santé, notamment via le contrat local de santé, outil central de réduction des inégalités socio-territoriales de santé. Le doublement des centres et maisons de santé d’ici 2022 s’articulera avec la stratégie portée par le contrat local de santé. En matière de prévention, conformément au Plan National de Santé Publique, les actions contribuant au renforcement de l’information en santé mentale et la prévention des souffrances physiques dans les QPV seront favorisées, en particulier dans le cadre des contrats de ville (en application de l’instruction interministérielle du 30 septembre 2018 relative à la consolidation et à la généralisation des CLSM). Enfin, plus largement, le soutien aux actions visant à l’amélioration des déterminants de la santé (notamment le logement, le cadre de vie, les actions partenariales impulsées dans le cadre de l’Ecole promotrice de santé et des Cités éducatives) seront encouragées en 2021.
L’action régionale de la politique de la ville en matière de santé
Au niveau régional, une enveloppe dédiée vise à soutenir des organismes qui concourent au déploiement des chantiers prioritaires en direction des 272 quartiers de la politique de la ville franciliens. La mission ville de la Préfecture de la région d’Ile-de-France soutient à ce titre un certain nombre de dispositifs et projets régionaux qui ont pour objectifs de réduire les écarts entre les QPV et le reste de la région, et qui accordent une attention particulière à la participation des bénéficiaires dans l’élaboration des projets. Dans le champ de la santé, outre le soutien à Promotion Santé Ile-de-France dans sa mission de consolidation et d’animation du réseau des coordinateurs/trices des ASV, CLS et CLSM, la mission ville soutient également les centres de ressources politique de la ville. L’action des CRPV contribue à l’animation des réseaux d’acteurs, notamment en place des séances de sensibilisation multi-acteurs, notamment sur l’accès aux soins dans les QPV.
En 2020, la mission ville a soutenu, en lien avec l’ANCT, un projet de centre de formation en santé communautaire porté par l’Association Communautaire Santé Bien Etre (ACSBE). Ce projet part du constat qu’il existe une spécificité à l’exercice de la santé au sein des quartiers populaires et que l’implication des habitants dans la promotion de la santé et les actions de santé publique doit être recherchée. Le projet a donc pour objectif de faciliter le transfert des bonnes pratiques à d’autres acteurs de l’exercice collectif en santé en quartier populaire. Le centre de formation est actuellement en cours de préfiguration, un catalogue de formations devrait bientôt être publié.
Enfin, la mission ville de la Préfecture de la région assure un rôle de coordination avec les autres services déconcentrés de l’Etat et les partenaires franciliens, en particulier concernant deux programmes structurants en Ile-de-France :
- Le PRIJ : depuis 2018, le Plan régional d’insertion pour la jeunesse des quartiers prioritaires (PRIJ) est déployé en Ile-de-France. Il se fonde sur la coopération entre l’ensemble des acteurs de terrain et vise à favoriser l’insertion sociale et professionnelle des jeunes des quartiers. L’objectif est d’offrir un accompagnement individuel renforcé aux jeunes en difficulté d’insertion, âgés de 16 à 25 ans et issus des QPV concernés. Le repérage des jeunes, coordonné localement par des groupes opérationnels, pilotés par un délégué du Préfet et réunissant les différents acteurs de l’accompagnement (services de l’Etat, collectivités territoriales, CAF, Pôle emploi, missions locales, etc.). Les groupes opérationnels assurent la centralisation du repérage des jeunes, et ont également pour rôles d’échanger sur leurs situations individuelles, de les orienter et d’assurer un suivi de l’évolution de leurs parcours. Afin de leur proposer les dispositifs d’aide les plus adaptés à leur situation (insertion sociale et professionnelle, éducation, sport, culture, santé, etc.), les principes de mise en œuvre du PRIJ sont d’aller à la rencontre des jeunes. A ce titre, l’accès aux soins est en enjeu majeur, d’où un partenariat fort dans le cadre de ce plan avec les espaces santé jeunes, les centres médico-psychologiques (CMP)/centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP), les centres de santé, les maisons des adolescents…
- Les cités éducatives : lancées par le Gouvernement en 2019, elles visent à renforcer les prises en charge éducatives pendant le temps scolaire et périscolaire en fédérant tous les acteurs éducatifs travaillant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (services de l’État, collectivités, associations, habitants). En Ile-de-France, 32 cités éducatives sont labellisées et bénéficient d’enveloppes financières au titre des crédits de la politique de la ville. Parmi ces cités éducatives, toutes proposent des actions santé, et 6 font de la santé un axe prioritaire dans le projet de la cité, ce qui se traduit au niveau local par la mise en œuvre d’actions et de projets destinés à favoriser l’accès aux soins des jeunes. Au niveau national, il existe un groupe animé par la Fédération nationale d'éducation et de promotion de la santé (FNES) qui propose aux pilotes des cités éducatives de partager leurs expériences et expertises dans le champ de la santé, et qui communique sur les ressources nationales et locales pouvant être mobilisées au sein des cités éducatives.
Tous les acteurs de la politique de la ville, œuvrant dans le domaine de la santé ou non, sont invités à s’inscrite sur la plateforme la Grande Equipe. Cet espace numérique, développé par l’ANCT, est mis à disposition de tous ceux qui agissent pour et avec les habitants des quartiers : agents de l’Etat et des collectivités territoriales, élus locaux, acteurs associatifs, conseils citoyens, entreprises…La plateforme a notamment vocation à faciliter la communication et la circulation d’informations. Les acteurs pourront ainsi s’inscrire aux groupes qui les intéressent et retrouver les actualités et documents ressources sur les différentes thématiques qui les concernent. [Flyer de présentation de la Plateforme de la Grande Equipe]
Bibliographie
Bibliographie de l'interview et ressources pour aller plus loin
Dossier Participation des habitants-usagers-citoyens
Notes:
- [1] . Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la santé communautaire est le processus par lequel les membres d’une collectivité, géographique ou sociale, conscients de leur appartenance à un même groupe, réfléchissent en commun sur les problèmes de leur santé, expriment leurs besoins prioritaires et participent activement à la mise en place, au déroulement et à l’évaluation des activités les plus aptes à répondre à ces priorités.
- [2] . Neither in Employment nor in education or training (NEET), désigne des personnes jeunes n’ayant ni formation, ni diplôme, ni travail.