Utiliser les cinq axes de la charte d'Ottawa dans ses projets

Cette animation (suivie de la retranscription intégrale du texte) est extraite d'une séquence du e-parcours sur la Promotion de la santé, module d'e-learning construit par PromoSanté Ile-de-France en 2022.

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Les grands principes de la Charte d'Ottawa

La Charte d'Ottawa en quelques mots

La charte d'Ottawa, adoptée en 1986, est considérée comme le texte fondateur de la promotion de la santé au niveau international. Et elle est toujours aujourd'hui un texte de référence fondamental pour les acteurs du secteur, portant des valeurs de solidarité et de justice sociale.
La charte d'Ottawa définit cinq priorités d’action :

  1. L’élaboration de politiques pour la santé
  2. La création d'environnements favorables
  3. Le renforcement de l'action communautaire
  4. L’acquisition d'aptitudes individuelles
  5. La réorientation des services de santé

Elle précise également trois stratégies d'intervention pour y parvenir : développer le pouvoir d'agir, jouer un rôle de médiateur et exercer un plaidoyer.

 

Pourquoi s'y référer a toujours du sens plus de 30 ans après ?

La force de la charte d'Ottawa a été de promouvoir l'idée que la promotion de la santé ne relève pas uniquement du secteur du soin, et ne se borne pas à préconiser des modes de vie qui favorisent la bonne santé.

Alors que la charte date de 1986, et qu'une dizaine d'autres chartes ou déclarations ont été adoptées depuis (dont la toute dernière, la Charte de Genève en 2021), on pourrait se demander si la charte d'Ottawa n'est finalement pas obsolète. Plusieurs raisons peuvent expliquer qu'elle est au contraire toujours d'actualité et surtout très utile aux professionnels.

  • Elle englobe toutes les dimensions de la promotion de la santé, en pointant sur l'importance de la prise en compte des différents déterminants, du plus individuel au plus systémique. Les chartes et déclarations ultérieures se sont souvent focalisées sur une ou quelques dimensions spécifiques, ancrées sur les évolutions sociétales, mais moins globales et ne remettant pas en cause les 5 axes de la charte d'Ottawa.
  • Ses cinq axes peuvent être utilisés comme un modèle, un cadre opérationnel qui permet de penser un programme d'actions cohérent. Ce cadre permet d'orienter des actions sur l'ensemble des déterminants de la santé. Et il est centré sur la réduction des inégalités sociales de santé, la prise en compte des environnements et conditions de vie, l'approche intersectorielle et pluridisciplinaire, et la participation des personnes et des groupes à des fins d’empowerment en matière de santé.

Au travers de cette séquence, nous allons montrer comment utiliser les cinq axes de la charte d'Ottawa pour structurer un programme global de promotion de la santé sur un territoire et une problématique donnés.

Détail des cinq axes de la Charte d'Ottawa

1. Elaboration de politiques pour la santé / d'une politique publique saine
« La promotion de la santé inscrit la santé à l’ordre du jour des responsables politiques des divers secteurs en les éclairant sur les conséquences que leurs décisions peuvent avoir sur la santé, et en leur faisant admettre leur responsabilité à cet égard. Elle combine des méthodes différentes mais complémentaires, et notamment : la législation, les mesures fiscales, la taxation et les changements organisationnels. »

2. Création d'environnements favorables
La santé des personnes ne dépend pas uniquement de leurs comportements : des facteurs extérieurs l'influencent également, de manière positive ou négative. La promotion de la santé s'occupe de créer des milieux favorables, pour tous : conditions de vie, aménagement du territoire, système éducatif, système de santé, contexte socio-culturel, contexte économique, conditions de travail, lien social, etc.

3. Renforcement de l'action communautaire
« La promotion de la santé procède de la participation effective et concrète de la communauté à la fixation des priorités, à la prise des décisions et à l’élaboration des stratégies de planification, pour atteindre un meilleur niveau de santé. La promotion de la santé puise dans les ressources humaines et physiques de la communauté, que ce soit les habitants, les usagers, les professionnels, les élus, etc. »

4. Acquisition d'aptitudes individuelles
« La promotion de la santé soutient le développement individuel et social en offrant des informations, en assurant l’éducation pour la santé et en perfectionnant les aptitudes indispensables à la vie. Ce faisant, elle permet aux gens d’exercer un plus grand contrôle sur leur propre santé, et de faire des choix favorables à celle-ci. »

5. Réorientation des services de santé
« Le rôle du secteur sanitaire doit abonder de plus en plus dans le sens de la promotion de la santé, au-delà du mandat exigeant la prestation des soins médicaux. Ceci doit mener à un changement d’attitude et d’organisation au sein des services de santé, recentrés sur l’ensemble des besoins de l’individu perçu globalement. » C'est à dire prendre en compte également l'environnement de l'individu (social, familial, de travail...).

 

Utilisation de la Charte d'Ottawa comme cadre opérationnel - Étude de cas

Présentation de l'étude de cas - La santé nutritionnelle des enfants

Pour réfléchir à la manière dont la charte d'Ottawa peut être utilisée comme un cadre opérationnel pour le développement de programmes en promotion de la santé, nous allons travailler sur une étude de cas liée à la santé nutritionnelle des enfants.

Pour rappel, le concept de nutrition englobe les questions relatives à l’alimentation et à l’activité physique. Travailler sur la question de la santé nutritionnelle, c'est donc s'intéresser à ces deux dimensions.

Décrivons le contexte dans lequel nous nous trouvons pour cette étude de cas fictive :

A l'initiative de la Mairie et faisant suite aux préoccupations remontées par les infirmières scolaires et les médecins, un diagnostic local partagé a été réalisé sur la ville, afin d’estimer la prévalence du surpoids et de l’obésité chez les enfants et adolescents et en comprendre les déterminants.
Le diagnostic local partagé est réalisé avec les acteurs du territoire, notamment les enfants, les jeunes et leurs parents, sur une pluralité de déterminants de santé. Ce diagnostic s'est notamment appuyé sur des chiffres issus du profil socio-sanitaire de la commune et de la cartographie interactive Inter-santé jeunes de l'Observatoire régional de santé d’Ile-de-France, ainsi que sur des chiffres recueillis auprès des équipements publics et associatifs de la commune, par quartier (fréquentation des clubs de sports, des centres de loisirs, des maisons de quartiers, etc…).
Une enquête qualitative a par ailleurs été réalisée pour obtenir des informations supplémentaires, et comprendre ce qui se passe sur le territoire.

Les indicateurs de santé nutritionnelle se sont avérés légèrement préoccupants par rapport à la moyenne départementale, notamment dans les quartiers prioritaires. Bien que ces chiffres ne soient pas encore alarmants, il est recommandé d’agir le plus précocement possible chez les enfants, afin d'éviter que cette prévalence ne s'aggrave.

Descriptif des actions possibles sur cette problématique et dans ce contexte (à titre d'exemples, ne se voulant pas exhaustif des actions possibles)

SENSIBILISATION DES DÉCIDEURS

 

 ACTIONS EN MILIEU SCOLAIRE - ALIMENTATION

 

COMMERCES ALIMENTAIRES

 

MOBILITÉS ACTIVES

 

JARDIN PARTAGÉ

 

FONCTIONS SUPPORT

 

Conditions pour des démarches répondant aux 5 axes de la Charte d'Ottawa

Pour conclure, le cadre proposé par les cinq axes de la Charte d’Ottawa reflète bien la pluralité des actions que, dans l’idéal, il faut engager pour développer une démarche de promotion de la santé.

C’est par l’articulation entre ces différents axes et entre différentes approches, différents publics et différentes finalités qu’un programme sur un territoire a le plus de chances d’atteindre les objectifs attendus, à savoir garantir que les habitants aient des conditions favorables pour améliorer leur santé globale.

Comme pour ce qui a été vu dans l’ensemble de ce module, et vu l’ampleur potentielle des actions à engager, à différents niveaux et dans différents lieux de vie, aucun acteur seul ne peut se lancer dans une réelle démarche de promotion de la santé. Le logement, l’urbanisme, la mobilité, la sécurité, l’éducation, l’emploi, le social, la politique de la ville et bien d’autres secteurs contribuent à la santé des populations, en agissant sur l’ensemble des déterminants de la santé.

Les maitres mots sont donc : partenariat sur un territoire, afin d’aller chercher les acteurs les plus à mêmes d’agir sur les déterminants et stratégies visés ; intersectorialité, en alliant le niveau politique, institutionnel, associatif, les habitants eux-mêmes, etc ; et également cohérence, car même si la pluralité est importante, mettre en place des stratégies avec des principes contradictoires auprès d’un même public est évidemment contre-productif.

Le point de départ importe peu, cela peut venir du politique, des professionnels comme des habitants eux-mêmes. La volonté et le soutien politiques sont des éléments incontournables. Mais ce qui est important est d’avancer ensemble, pas à pas. Il n’est pas possible de réaliser un projet parfait de promotion de la santé en quelques mois, si l’on souhaite travailler tous les axes et tous les déterminants.

 

Cela se fera petit à petit, chaque étape permettant de pointer les manques et réfléchir aux actions complémentaires à mener, comme dans l’exemple sur la santé nutritionnelle.

Et sans oublier l’évaluation des projets, en tenant compte du fameux adage :

 

E-parcours en promotion de la santé